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  • il y a 4 jours
Jeudi 12 juin 2025, retrouvez Stéphane Deo (Gérant senior, Eleva Capital) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.

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Transcription
00:00...
00:00On poursuit cette édition spéciale de Smart Bourse depuis le Midsommar du patrimoine organisé par la CNCGP à la Maison de la Chimie.
00:17A mes côtés désormais, Stéphane Déo, gérant senior chez Eleva Capital. Bonjour Stéphane.
00:22Bonjour Grégoire.
00:23Merci d'être avec nous. On se voit régulièrement dans Smart Bourse, dans l'émission.
00:26Stéphane, je voulais qu'on essaye de prendre un peu de hauteur avec vous. Vous gérez une stratégie globale macro, comme on dit, c'est ça ?
00:33Oui, c'est ça. Multi-actifs et global.
00:36Comment on réfléchit aux déterminants de marché en essayant de sortir un peu du bruit quotidien du marché ?
00:43C'est-à-dire, qu'est-ce qui va faire la dynamique des marchés globaux ? Vous êtes multi-classe d'actifs.
00:49Alors, sur des horizons, à vous de les définir de quelques mois, quelques trimestres, peut-être 12, 18 mois, même si on ose être un peu ambitieux, Stéphane.
00:59C'est long tout ça.
00:59Mais qu'est-ce qui va conduire la dynamique des marchés, selon vous, au cours de la prochaine année, pour dire les choses ?
01:07Si on prend un tout petit peu de recul, je pense qu'il y a deux éléments qui me semblent très importants.
01:14D'abord, en allocation d'actifs, donc on arbitre entre les actions, les taux, le crédit, etc.
01:19Ce genre de fonds est un petit peu traumatisé parce qu'en 2022, on a eu un rebond de l'inflation, les taux ont monté.
01:28Donc la poche taux a perdu énormément et en même temps, les actions ont baissé.
01:32Donc l'idée, c'est que votre poche taux doit compenser les actions.
01:35Là, vous vous êtes fait, vous avez pris des claques.
01:38Ça ne fonctionne plus.
01:38Ça n'a pas fonctionné du tout, du tout.
01:41Pourquoi ? Pendant les 20 ans qui avaient précédé, ça avait très bien fonctionné.
01:45En fait, il y a une constante qui est assez forte, qui est que quand vous avez une inflation très importante,
01:52cet arbitrage entre actions et taux ne fonctionne pas.
01:55On l'a vu avant l'an 2000.
01:57Si vous regardez la décennie de 1990, si vous regardez la période 2020-2023, ça ne marche pas.
02:06Quand on est en inflation basse, par contre, là, ça fonctionne.
02:09Pourquoi ? Parce que quand votre inflation est basse, les chocs, c'est surtout des chocs de croissance.
02:14Donc plus de croissance, c'est des taux qui montent.
02:16Vous perdez sur les taux, mais vous gagnez sur les actions.
02:19Et vice-versa, quand vous avez une récession...
02:21Je l'entends.
02:21Donc là, ça marche.
02:22Je pense que le point important, c'est qu'on est sorti de cette phase d'inflation importante.
02:28En gros, le point d'inflexion, il est quand vous êtes au-dessus de 3% d'inflation.
02:31Si on revient sur quelque chose de raisonnable, c'est-à-dire l'inflation à 2-3,
02:35ce genre de fonds redevient pertinent.
02:38L'arbitrage, taux, actions, change.
02:41Et ça, c'est vraiment quelque chose de fondamental parce que ça permet de gérer...
02:45On retrouve une assise.
02:47Voilà.
02:47Vous avez vraiment une assurance qui ne se casse pas la figure quand vous en avez besoin.
02:51C'est une assurance qui vraiment vous assure.
02:54Donc ça, c'est un premier point qui est vraiment structurel, qui est très, très important, je pense.
02:59Et vous êtes convaincu que oui, on peut rester dans un régime d'inflation 3% autour qui conviendrait à tout le monde ?
03:05Je pense, oui. Oui, oui, je pense. Je pense que ce qu'on a vu pendant les 2-3 années qui ont suivi le Covid,
03:12c'est vraiment quelque chose d'exceptionnel.
03:14Et d'ailleurs, il y a eu tout ce débat sur l'inflation transitoire ou pas.
03:18Bon, je n'y reviens pas. Tout est transitoire.
03:21Elle a fini par être transitoire.
03:23Voilà.
03:24En tout cas, l'inflation à 10% a été transitoire.
03:26Ce qui n'est pas transitoire, c'est le débat sur le transitoire.
03:29Par contre, 18, qui lui perdure.
03:30Mais on a bien vu que c'est monté très fort, parce qu'on est quand même arrivé à 10% d'inflation.
03:37Vous m'auriez dit en 2020, 10% d'inflation, je vous aurais rayonnée.
03:40Deux ans plus tard, on est quand même redescendu à des niveaux inférieurs à 2 sur les derniers chiffres de l'ABC.
03:46Donc ça, convaincu, jamais.
03:48Mais je pense que oui, effectivement, il y a des fortes chances pour qu'on soit sur une inflation qui ne dépasse pas les 2-3%.
03:55Pour l'anecdote, si vous regardez l'inflation en Europe depuis le début de la zone euro,
04:00c'est-à-dire depuis le 1er janvier 1999, en moyenne, la BCE a fait 2,13% d'inflation.
04:06C'est long.
04:07On n'est pas loin de l'objectif.
04:09Ah oui, alors on disait avant, proche mais inférieure.
04:13Oui.
04:13Mais j'allais dire, après ce qu'on a traversé, 2,13% en moyenne depuis 25 ans, c'est pas mal quand même.
04:20On tape beaucoup sur la BCE.
04:21À mettre au crédit de la BCE alors.
04:23On tape beaucoup sur la BCE, en fait, ils ont quand même quelques réussites aussi.
04:28Donc premier point clé, retour de cet équilibre 60-40, on l'appelle comme on veut, 50-50.
04:32Mais ça redevient une solution pertinente.
04:36Oui. Le deuxième point, c'est tout ce débat sur l'exceptionnalisme américain.
04:43Pour être honnête, sur les dix dernières années, c'était simple.
04:46Vous surpenderiez les États-Unis, vous partiez à la pêche et vous reveniez, vous aviez fait une très belle performance.
04:52C'était un no-brainer, comme on dit. Pas besoin de réfléchir.
04:55C'était, voilà. En bon français, on disait, voilà.
04:57Je pense que la situation est beaucoup plus compliquée maintenant.
05:00Et on l'a vu depuis le début de l'année, l'Europe a beaucoup mieux performé.
05:04Il y a un vrai sujet sur la trajectoire des États-Unis.
05:09Et moi, je le vois. Alors nous, on est un fonds très agile, relativement petit à l'échelle des marchés.
05:16Mais quand on regarde les gros mammouths, les fonds de pension canadiens, les fonds souverains du Moyen-Orient,
05:23les fonds de pension australiens, il y a une vraie question sur l'allocation aux États-Unis.
05:29Vous avez 70% du MSCI World qui est aux États-Unis.
05:33Les gens ont fait le même raisonnement que je viens de faire, on surprendère les États-Unis.
05:37Donc tous ces fonds ont, alors je n'ai pas le détail de tous les fonds, mais ont une part de leur investissement aux États-Unis qui est absolument monstrueuse.
05:46Et ça, c'est amené à baisser petit à petit.
05:49C'est une pure question de gestion du risque ?
05:52Oui, je pense.
05:53C'est ça, c'est du risque management à ce stade.
05:55Alors après, il faut faire attention à ne pas verser dans l'excès inverse.
06:00Je ne veux pas vous bombarder de chiffres, mais le ROE, c'est-à-dire la rentabilité des fonds propres aux États-Unis, c'est 19%.
06:07Il distribue à peu près 70% des bénéfices, donc vous êtes assis sur du 14%.
06:13En Europe, c'est 9%. Au Japon, c'est 5%.
06:16Donc si vous sous-pondérez les États-Unis, vous sous-pondérez un portage qui est important.
06:23Donc il faut faire attention à ne pas verser dans l'excès inverse, c'est-à-dire les États-Unis, c'est fini, ils sont en faillite.
06:29Ce n'est pas le misérabilisme, on ne passe pas de l'exceptionnalisme au misérabilisme américain.
06:33Comme souvent sur les marchés, la question c'est où est-ce qu'on met le curseur.
06:36Et là, sur les États-Unis, on a mis le curseur pendant le dernier décès très haut.
06:41Je pense qu'il va y avoir un retour de balancier. Il faut faire attention à ne pas être pêché par excès de pessimisme non plus.
06:49Mais vous dites les mouvements de capitaux, des détenteurs d'actifs, on ne les a pas encore vus en fait.
06:54Et ça, alors ce qu'on voit de plus en plus, c'est que les capitaux qui rentrent ne sont plus investis aux États-Unis, mais ailleurs.
07:00Le nouveau flux déjà ne va plus autant qu'avant sur le dollar.
07:03Par contre, voilà, pour revenir sur ces mammouths qui gèrent des milliers de milliards,
07:08c'est très très difficile de rebalancer le portefeuille du jour au lendemain.
07:11Donc ça va se faire de manière graduelle.
07:13Mais ça, je trouve intéressant parce que ça veut dire que la location régionale devient très importante.
07:20C'est-à-dire qu'il faut être au bon endroit, au bon moment.
07:22L'année dernière, il fallait avoir des États-Unis.
07:25Ils sont devenus abominablement chers vis-à-vis de l'Europe à la fin de l'année.
07:29Mais nous, alors pour être honnête, je ne m'attendais pas à toute l'épitrerie de Trump, mais non, non, mais pour être honnête, on est passé surpondérés à l'Europe pour des questions de valorisation.
07:38On a forcé le trait quand Trump a commencé à sortir tous ces merveilleuses idées, les tableaux, etc.
07:47Mais on voit bien qu'on peut très bien avoir une phase de surperformance de l'Europe qui perdure encore un certain temps.
07:55Donc l'agilité régionale, je trouve, devient beaucoup, beaucoup plus pertinente qu'elle l'a été pendant la dernière décennie.
08:02Ou une fois de plus, vous étiez sous-pondérés États-Unis.
08:06Oui, vous étiez quasiment sûr de gagner à tous les coups.
08:10Qu'est-ce qui crée cette défiance ?
08:13C'est-à-dire qu'il y a un surexceptionnalisme américain qu'on corrige un petit peu, le cycle, la conjoncture, le ralentissement de l'économie américaine qu'on attend aide peut-être à ça.
08:23Derrière ça, qu'est-ce qui justifie la défiance au moins intellectuelle dont on discute aujourd'hui, Stéphane ?
08:30C'est un problème de gouvernance, c'est un problème de casting avant tout.
08:33C'est-à-dire que c'est l'épisode Trump qui crée cette défiance vis-à-vis du dollar ?
08:38Oui, je pense. Alors l'épisode Trump, il y a une grande question à laquelle je ne sais pas répondre.
08:43Est-ce que c'est une aberration ? Il se trouve qu'il y a un personnage comme ça.
08:47Ou est-ce que le successeur et le successeur du successeur s'inscriront également dans cette vaine-là ?
08:50Et ça, je ne sais pas.
08:53Mais je vais juste vous donner un exemple.
08:55Obama avait négocié un traité de commerce avec les pays du Pacifique.
09:00Donc ça a duré, je crois, 5 ans, 6 ans, la négociation.
09:05Le contrat, enfin, pardon, l'accord est signé.
09:08Trump 1 arrive.
09:10Un mois après, il a tout abroché.
09:13Trump perd les élections.
09:15Vous avez Biden qui revient.
09:17Les pays n'ont même pas commencé à renégocier.
09:19Ça ne sert à rien.
09:20Si vous n'allez pas vous remettre à renégocier pendant 5 ans,
09:22avec le risque d'avoir Trump 2 qui, en plus, est matérialisé,
09:26donc vous avez cassé quelque chose.
09:28Il y a vraiment une question de confiance de long terme qui est cassée.
09:33Et ça, autant casser la confiance, ça se fait très vite.
09:37La réparer, c'est facile.
09:39Ce n'est pas le terme, mais la réparer, c'est plus longtemps.
09:41Donc je pense qu'il y a vraiment eu un point d'inflexion et quelque chose d'intéressant.
09:45Si maintenant, je regarde avec le petit bout de la lauriente de personnes comme moi
09:52qui ont le nez sur leur écran blueberg toute la journée.
09:55C'est le job.
09:56Oui, c'est mon job.
09:57La corrélation entre le VIX et le dollar est négative.
10:01Alors, qu'est-ce que ça veut dire, ce jargon ?
10:02Le VIX, vous savez, c'est l'indice de volatilité, l'indice de peur.
10:05Quand le VIX augmente, c'est que les marchés ont peur.
10:08Normalement, tout le monde achète du dollar.
10:09Refuge sur le dollar.
10:10Refuge sur le dollar.
10:11Là, tout le monde vend du dollar.
10:12Alors, je triche parce que c'est juste les dernières semaines, les derniers mois
10:17où ça s'est passé comme ça.
10:19Mais ça, c'est vraiment un symptôme fort.
10:21J'entends.
10:22Enfin, c'est un signe fait.
10:22Oui, oui, oui.
10:23Mais c'est vraiment un symptôme que...
10:26C'est une mécanique qui dit quelque chose.
10:28Le réflexe pavlovien des marchés de dire, le refuge, c'est le dollar, a disparu.
10:34Ça durera ce que ça durera.
10:35Mais il y a vraiment quelque chose qui se passe.
10:36En sous-jacent, il y a la question des déficits aussi, Stéphane.
10:40Alors, qui participe peut-être, quand on parle des États-Unis, à la défiance vis-à-vis du dollar.
10:45Pour le coup, on ne peut pas tout mettre sur le dos de Donald Trump.
10:48Le niveau de déficit, 6-7%, il a existé avant Trump.
10:54La question, c'est qu'on n'en sort pas.
10:57Ou en tout cas, il n'y a pas de visibilité sur une sortie vers une consolidation des finances publiques
11:04ou une meilleure orthodoxie budgétaire côté américain.
11:09Est-ce que le marché a trouvé le bon prix par rapport à ce niveau de déficit,
11:12semble-t-il, qui est amené à durer pour la première puissance économique mondiale ?
11:16Alors, le premier point, juste, je voudrais faire un petit retour historique.
11:21En 1993, le déficit américain, c'était 7%.
11:26D'accord.
11:28Quand Clinton quitte le pouvoir en 2001, le déficit américain avait été résorbé.
11:34En fait, il y avait un petit surplus.
11:36Si vous regardez les mesures fiscales qui ont été prises, budgétaires, c'est à peu près 1,5%.
11:41Donc, on est passé de 7 à 0 avec 1,5% d'effort.
11:45Vous allez me dire, c'est quoi ce miracle ?
11:46Le miracle, c'est la croissance, la productivité.
11:49Bien sûr.
11:49Donc, le pire n'est jamais certain.
11:52Si l'intelligence artificielle crée vraiment un choc de productivité et de croissance,
11:58on peut se retrouver avec la même histoire que les années 90.
12:01Alors, évidemment, il faut faire du wishful thinking une fois de plus pour parler en bon franglais.
12:07Ce n'est pas sûr.
12:08Mais ça, c'est la première réponse.
12:10C'est que le pire n'est jamais certain.
12:12Après, en fait, j'ai vu Larry Summers il n'y a pas longtemps.
12:18N'est-ce pas ?
12:19Bonjour à Larry.
12:20Merci.
12:20Bonjour à Larry.
12:21Cher ami.
12:22Et lui, il fait un calcul qui est un peu un calcul d'économiste, j'allais dire de base,
12:27mais qui est le calcul que je fais.
12:28Il dit, les taux neutres, c'est quoi ? C'est à peu près 2%.
12:30Vous rajoutez 2,5% d'inflation.
12:36Donc, vous êtes à 4,5%, 5%.
12:39Et puis, un petit surplus pour le risque qu'on prend, quoi.
12:42Voilà.
12:42Donc, ça, c'est les taux courts.
12:43Mais les taux longs, c'est 100 BP de plus.
12:46Donc, 1% de plus, il dit 6.
12:48D'accord.
12:49Et si vous voulez, je trouve que c'est un petit peu poussé loin, mais il y a une autre règle
12:54qui est plus simple et qu'on appelle la règle d'or chez les économistes, c'est
12:56qu'il dit que vos taux doivent être proches de la croissance nominale.
13:01Pareil, vous mettez 2% de croissance, 2,5% d'inflation, ce qui est le minimum.
13:06Vous êtes à 4,5%, minimum.
13:07Plutôt 5, d'ailleurs, que 4,5%.
13:10Donc, pour moi, les taux, s'ils arrivent proches de 5%, ce n'est pas du tout une aberration.
13:15C'est juste qu'on a fait 10 ans avec des politiques monétaires extrêmement agressives
13:21qui ont pesé sur la courbe, qui ont mis des taux à des niveaux anormalement bas.
13:25Mais si on oublie ces 10 ans qui sont anormaux, exceptionnels, les forces de marché, c'est
13:32plutôt du 5% que du 3% ou du 2% sur le 10 ans américain, à mon avis.
13:38Merci beaucoup Stéphane.
13:39Merci pour cet éclairage de marché à l'issue de ce premier semestre qui aura vu effectivement
13:44naître, émerger ce questionnement, on va appeler ça comme ça, sur l'exceptionnalisme
13:49américain et le poids des actifs en dollars dans des allocations stratégiques.
13:54Stéphane Déo, gérant senior chez Eleva Capital qui nous a accompagnés également
13:58à l'occasion de cette édition spéciale de Smart Bourse depuis le Midsommar du patrimoine.

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